L’agent commercial est un acteur clé dans le développement commercial des entreprises. Mandaté pour prospecter, négocier et conclure des contrats de vente ou de prestation de services, il exerce son activité en toute indépendance, sans lien de subordination avec l’entreprise qui l’emploie. Lorsqu’un agent commercial voit son contrat rompu par son mandant, il peut prétendre à une indemnité compensatrice pour le préjudice subi.
La récente décision de la Cour de cassation du 29 janvier 2025 (n°23-21527) rappelle une règle fondamentale : les événements postérieurs à la rupture du contrat ne doivent pas être pris en compte pour fixer le montant de l’indemnité due à un agent commercial. Cette jurisprudence a un impact direct sur la relation contractuelle entre les entreprises et leurs agents commerciaux.
Cet article détaillera les conditions d’octroi de l’indemnité de rupture, les éléments à prendre en compte dans le calcul ainsi que les conséquences.

Table des matières
L’agent commercial et le droit à indemnité en cas de rupture
1 Définition et statut juridique
L’agent commercial est un mandataire qui négocie et conclut des contrats pour le compte d’une entreprise. Contrairement à un salarié, l’agent commercial est juridiquement indépendant et ne relève pas du droit du travail, mais du Code de commerce.
Son statut est encadré par les articles L. 134-1 et suivants du Code de commerce. En cas de rupture du contrat par le mandant, il bénéficie d’une protection légale qui lui garantit une indemnisation pour la perte de son activité et de sa clientèle.
Caractéristiques | Non. |
---|---|
Lien de subordination | Non. |
Non. | Oui. |
Oui. | Oui |
Régime fiscal et social | Travailleur indépendant |
2 conditions pour bénéficier de l’indemnité de rupture
L’agent commercial peut prétendre à une indemnité de rupture si trois conditions sont réunies :
- Le contrat est rompu par le mandant et non par l’agent commercial.
- n’a pas commis de faute grave justifiant une rupture sans indemnité.
- a subi un préjudice financier, notamment par la perte de ses commissions et de sa clientèle.
L’indemnité de rupture est un droit automatique, sauf en cas de faute grave.
Calcul de l’indemnité de rupture d’un agent commercial
1 Méthode de calcul usuelle
L’indemnité de rupture d’un agent commercial est généralement évaluée en fonction des commissions perçues avant la rupture. La méthode usuelle consiste à appliquer la règle des deux ans :
Indemnité = moyenne des commissions des deux dernières années d’activité.
Toutefois, cette méthode peut être ajustée en fonction des spécificités du contrat et des éléments économiques.
Année | Commission Annuelle (en €) | Moyenne sur 2 ans (en €) |
---|---|---|
N-1 | 80 000 | 90 000 |
N-2 | 100 000 | 90 000 |
Indemnité estimée | 90 000 |
2 Influence des événements postérieurs à la rupture
La Cour de cassation a rappelé que seuls les éléments antérieurs à la rupture doivent être pris en compte dans le calcul de l’indemnité. Ainsi, si un agent commercial retrouve rapidement un nouveau mandat ou perçoit des commissions après la rupture, ces éléments ne peuvent pas réduire l’indemnité à laquelle il a droit.
La décision du 29 janvier 2025 annule ainsi un précédent arrêt qui avait tenu compte du fait que l’agent commercial avait retrouvé un emploi.
Jurisprudence et application pratique
1 Rappel de la décision de la Cour de cassation du 29 janvier 2025
Dans cette affaire, un agent commercial ayant travaillé pendant 5 ans pour une société voit son contrat résilié. Il réclame 160 000 € d’indemnité, mais la cour d’appel limite cette indemnité à 10 000 € en considérant que :
- L’agent commercial n’était pas soumis à une clause de non-concurrence.
- Il a rapidement retrouvé un emploi.
- Il ne justifie pas d’une perte de revenus conséquente.
La Cour de cassation annule cette décision, rappelant que seuls les éléments antérieurs à la rupture comptent.
2 Impact pour les entreprises et les agents commerciaux
les conséquences de cette jurisprudence sont significatives :
- Pour les agents commerciaux : cette décision renforce leurs droits, en garantissant une indemnisation équitable.
- Pour les entreprises : elles doivent anticiper l’indemnisation en cas de rupture, sans pouvoir se défendre en invoquant une reconversion rapide de l’agent.
Acteur | Conséquences |
---|---|
Agent commercial | Droit renforcé à l’indemnité, même en cas de reprise d’activité rapide |
Mandant | Obligation de verser l’indemnité sans tenir compte des revenus postérieurs |
Comment protéger ses intérêts en tant qu’agent commercial ?
L’agent commercial exerce son activité de manière indépendante, mais il doit veiller à protéger ses droits, notamment en cas de rupture de contrat avec son mandant. L’indemnité de rupture est un droit reconnu par le Code de commerce, mais pour en bénéficier pleinement et éviter toute contestation, l’agent commercial doit adopter certaines précautions.
1. Rédiger un contrat solide
Le contrat d’agent commercial est la base de la relation avec le mandant. Il doit être précis et détaillé afin d’éviter toute ambiguïté en cas de rupture. Voici les éléments essentiels à inclure :
- Durée du contrat : déterminer s’il est à durée déterminée ou indéterminée.
- Mode de rémunération : préciser les commissions, leur calcul et leur fréquence de paiement.
- Conditions de résiliation : encadrer les motifs et les délais de préavis.
- Indemnité de rupture : indiquer la méthode de calcul et les conditions d’application.
- Clause de non-concurrence : définir si l’agent commercial peut ou non travailler avec des concurrents après la rupture.

Un contrat bien rédigé protège l’agent commercial contre les litiges et renforce ses droits en cas de rupture abusive.
2 Justifier ses commissions et son activité
L’indemnité de rupture est généralement calculée en fonction des commissions perçues au cours des deux dernières années. Il est donc essentiel que l’agent commercial archive tous les documents prouvant son chiffre d’affaires et son rôle dans le développement des ventes.
Les preuves à conserver incluent :
- relevés de commissions et factures émises,
- contrats conclus grâce à son intervention,
- correspondances avec les clients et le mandant,
- preuves d’un portefeuille client actif,
- Rapports de performance et statistiques de vente.
En cas de contestation, ces éléments permettront à l’agent commercial de démontrer l’impact de son travail et d’obtenir une indemnité juste.
3 Anticiper une éventuelle rupture
L’agent commercial doit toujours être préparé à une résiliation de contrat. Pour cela, il est conseillé de :
- Diversifier ses mandants afin de ne pas dépendre d’une seule entreprise,
- Éviter de signer des clauses abusives qui pourraient limiter ses droits,
- Consulter un avocat spécialisé avant de signer un contrat ou en cas de litige.
En sécurisant son activité dès le départ, l’agent commercial s’assure de protéger ses intérêts et d’obtenir une indemnité équitable en cas de rupture de contrat.
Conclusion
L’agent commercial bénéficie d’un cadre juridique protecteur en cas de rupture de son contrat. La décision du 29 janvier 2025 de la Cour de cassation confirme que l’indemnité ne doit pas être réduite en raison des revenus perçus après la rupture.
Cette jurisprudence renforce les droits des agents commerciaux, tout en obligeant les entreprises à respecter leurs obligations financières en cas de rupture de contrat. Pour un agent commercial, il est crucial de bien rédiger son contrat et de justifier ses commissions afin d’obtenir une indemnisation équitable.
En anticipant ces aspects, l’agent commercial peut sécuriser son activité et éviter tout contentieux long et coûteux.