Le droit aux congés payés et arrêts de travail est un pilier essentiel de la protection des salariés. Pourtant, lorsqu’un arrêt de travail pour maladie ou accident survient, ce droit se retrouve suspendu, soulevant des questions complexes dès lors qu’il interfère avec la période prévue de report. La situation se complique encore si un second arrêt de travail empêche le salarié de profiter des congés reportés.
Dans une décision du 13 novembre 2025, la Cour de cassation a tranché un litige opposant un agent de la SNCF à son employeur sur cette question précise. Cette affaire met en lumière la responsabilité de l’employeur dans l’organisation effective du droit au congé, même en cas d’empêchement prolongé du salarié.

Table des matières
Un éclairage important du 13 novembre 2025
Dans une décision du 13 novembre 2025, la Cour de cassation a statué sur le cas d’un salarié de la SNCF empêché de prendre ses congés payés et arrêts de travail reportés en raison d’un nouvel arrêt maladie. Elle rappelle une règle essentielle : les jours de congé non pris ne peuvent être considérés comme perdus si l’employeur ne prouve pas avoir permis au salarié d’exercer ce droit avant la fin du délai de report.
Congés reportés après un arrêt maladie ou accident : ce que prévoit la loi
Le cadre européen
La CJUE admet depuis 2011 qu’un État peut limiter la durée du report des congés non pris pendant un arrêt maladie, à condition que ce délai soit plus long que la période d’acquisition. Cela vise à préserver un équilibre entre protection de la santé du salarié et sécurité juridique pour l’employeur.
Le droit français depuis avril 2024
Depuis le 24 avril 2024, le Code du travail prévoit une période de report de 15 mois pour prendre les congés non utilisés à cause d’un arrêt maladie ou accident. Ce délai commence :
- à la reprise du travail, dès lors que l’employeur a informé le salarié de ses droits ;
- ou, dans certains cas, à la fin de la période d’acquisition si le contrat est suspendu depuis plus d’un an.
Un accord d’entreprise peut étendre ce délai au-delà des 15 mois.
Et si un nouvel arrêt survient pendant le report ?
Un vide juridique en partie comblé
Le texte de loi ne dit rien sur les cas où un salarié tombe de nouveau malade pendant cette période de report. Toutefois, selon la Direction générale du travail, il est recommandé que l’employeur tienne compte de ce nouvel empêchement pour garantir au salarié un délai suffisant.
L’importance du contexte de l’entreprise
Un accord collectif peut apporter une réponse explicite. Dans l’affaire jugée en novembre 2025, le cas concernait un salarié de la SNCF, soumis à des règles particulières. Cependant, les principes dégagés par la Cour peuvent s’appliquer à d’autres entreprises.
Le cas jugé : congés perdus ou maintenus ?
Les faits
Un agent de la sûreté ferroviaire à la SNCF a été en arrêt de travail pour accident du 3 mai 2017 au 3 mars 2019, puis de nouveau à compter du 5 mars 2020. Il devait prendre 13 jours de congé acquis en 2018 avant le 31 mars 2020. Mais ce deuxième arrêt l’a empêché de le faire.
L’employeur a considéré ces congés comme perdus. Le salarié a contesté et saisi les prud’hommes.
La décision
Les juges d’appel ont condamné l’employeur à restituer les jours perdus, et la Cour de cassation a confirmé Elle a précisé que l’employeur ne peut se décharger de ses obligations qu’en démontrant qu’il a informées et mis en capacité le salarié de prendre ses congés.
Les principes dégagés
Pas de perte automatique des congés
La jurisprudence européenne, suivie par la Cour de cassation, interdit de considérer automatiquement les congés comme perdus. Il faut vérifier si le salarié a réellement pu les prendre.
Obligation active de l’employeur
L’employeur a un devoir d’information et d’organisation. Il doit :
- informer clairement le salarié du nombre de jours restants et du délai de report ;
- permettre concrètement la prise des congés dans ce délai.
S’il ne le fait pas, il ne peut invoquer la perte de ces droits.
Que retenir pour les employeurs et salariés ?
Pour les employeurs
Ils doivent systématiquement :
- documenter la communication des droits à congés ;
- s’assurer que les salariés peuvent effectivement les exercer, même en cas d’arrêts successifs.
Pour les salariés
Ils peuvent faire valoir leur droit à congé même après un nouvel arrêt maladie, si l’employeur ne peut prouver avoir rempli ses obligations. La charge de la preuve pèse sur ce dernier.
Cette décision de 2025 renforce le principe selon lequel le droit au repos ne peut être perdu par simple échéance de délai si l’employeur n’a pas agi. Elle invite à une vigilance accrue sur l’information et la gestion des congés payés, notamment en cas d’arrêts de travail prolongés ou répétés.
courdecassation.fr/decision/6915978d5cc9fa7cae5abe7b