Avec l’arrivée de septembre 2024, une nouvelle période de modulation des cotisations patronales d’assurance chômage prend effet. Ce dispositif, appelé « bonus-malus », vise à inciter les entreprises à favoriser l’emploi durable et à pénaliser celles qui abusent des contrats courts. L’arrêté du 22 août 2024, publié au Journal Officiel, établit les taux de séparation médians par secteur d’activité pour cette nouvelle période. Dans cet article, nous détaillons ces taux, leur impact sur les entreprises et faisons le bilan de ce dispositif depuis son lancement en septembre 2022.
Simulateur pour le bonus malus
Rappel du dispositif bonus-malus
Le bonus-malus est un mécanisme introduit en septembre 2022, appliqué aux entreprises de 11 salariés ou plus opérant dans certains secteurs jugés sensibles en matière de recours aux contrats courts. Le but est de moduler les cotisations patronales d’assurance chômage en fonction du taux de séparation de l’entreprise, c’est-à-dire le nombre de fins de contrat de travail ou de missions d’intérim ayant conduit à une inscription à Pôle emploi.
Le taux normal de cotisation est fixé à 4,05 %. Cependant, ce taux peut être réduit à 3 % pour les entreprises performantes (bonus) ou augmenté jusqu’à 5,05 % pour celles qui affichent un taux de séparation élevé (malus).
Les secteurs d’activité concernés
Le bonus-malus ne s’applique pas à toutes les entreprises. Seuls sept secteurs d’activité sont concernés par ce dispositif. Il s’agit des secteurs suivants :
- Fabrication de denrées alimentaires, de boissons et de produits à base de tabac
- Production et distribution d’eau, assainissement, gestion des déchets et dépollution
- Autres activités spécialisées, scientifiques et techniques
- Hébergement et restauration
- Transports et entreposage
- Fabrication de produits en caoutchouc et en plastique ainsi que d’autres produits minéraux non métalliques
- Travail du bois, industries du papier et imprimerie
Ces secteurs ont été identifiés comme ayant un recours important aux contrats courts, justifiant ainsi la mise en place de ce mécanisme de régulation des cotisations.
Tableau des taux de séparation médians pour septembre/octobre 2024
Les taux de séparation médians, calculés sur la période de référence du 1er juillet 2023 au 30 juin 2024, sont les suivants :
Secteur d’activité | Taux de séparation médian |
Fabrication de denrées alimentaires, de boissons et de produits à base de tabac | 190,77 % |
Production et distribution d’eau, assainissement, gestion des déchets et dépollution | 54,42 % |
Autres activités spécialisées, scientifiques et techniques | 8,92 % |
Hébergement et restauration | 69,81 % |
Transports et entreposage | 42,83 % |
Fabrication de produits en caoutchouc et en plastique ainsi que d’autres produits minéraux non métalliques | 90,94 % |
Travail du bois, industries du papier et imprimerie | 89,36 % |
Ces taux serviront de base pour déterminer si une entreprise se trouve en situation de bonus ou de malus pour la période de modulation septembre/octobre 2024. Ainsi, les entreprises avec un taux de séparation supérieur au taux médian de leur secteur subiront une majoration de leur cotisation (malus), tandis que celles ayant un taux de séparation inférieur bénéficieront d’une réduction (bonus).
Impact du bonus-malus sur les entreprises
Le mécanisme de bonus-malus a été mis en place pour inciter les entreprises à favoriser des contrats longs et à éviter les recours excessifs aux contrats précaires. Cependant, les impacts varient grandement d’un secteur à l’autre et d’une entreprise à l’autre.
Les avantages du dispositif
- Réduction du turnover : Dans certains secteurs, notamment l’hôtellerie-restauration et le transport, le dispositif a poussé les entreprises à stabiliser leur effectif. En effet, la menace d’une augmentation des cotisations a incité les employeurs à proposer des contrats plus longs et à limiter le recours aux missions d’intérim.
- Amélioration de la gestion RH : Le besoin de maîtriser le taux de séparation a poussé certaines entreprises à repenser leur stratégie de gestion des ressources humaines. En misant sur la fidélisation des salariés, certaines entreprises ont pu réduire leurs coûts et profiter du bonus.
- Incitation à l’embauche durable : Le bonus-malus agit comme un levier pour favoriser les embauches pérennes, en particulier dans les secteurs où les contrats courts étaient auparavant la norme.
Les défis du dispositif
- Secteurs pénalisés : Certains secteurs, tels que la fabrication de denrées alimentaires et le travail du bois, continuent d’afficher des taux de séparation élevés. En raison de la nature saisonnière de leur activité ou d’autres facteurs structurels, ces entreprises sont particulièrement exposées aux malus.
- Inégalité d’adaptation : Toutes les entreprises n’ont pas pu s’adapter à ce dispositif. Certaines peinent à ajuster leur stratégie d’emploi, soit par manque de ressources, soit en raison de la difficulté à trouver des alternatives aux contrats courts.
- Complexité administrative : La mise en œuvre du bonus-malus a également été critiquée pour sa complexité administrative. Les entreprises doivent suivre de près leurs taux de séparation, ce qui peut représenter un fardeau administratif supplémentaire, notamment pour les PME.
Prolongation du dispositif jusqu’au 31 octobre 2024
Le dispositif du bonus-malus, initialement prévu pour se terminer en août 2024, a été prolongé jusqu’au 31 octobre 2024. Cette décision est liée à la prolongation des règles d’indemnisation du chômage jusqu’à cette même date, ce qui permet de maintenir la continuité du système en attendant une éventuelle réforme.
Bilan du bonus-malus depuis 2022
Depuis son introduction en septembre 2022, le bonus-malus a eu des effets significatifs sur certains secteurs d’activité. Le bilan est cependant contrasté :
- Secteurs bénéficiant du bonus : Certaines entreprises, notamment dans les secteurs des activités scientifiques et techniques, ont vu leur taux de séparation diminuer de manière significative, ce qui leur a permis de bénéficier du taux de cotisation réduit. Cela s’est traduit par des économies substantielles sur les cotisations patronales.
- Secteurs pénalisés par le malus : En revanche, les entreprises dans des secteurs tels que la fabrication de produits alimentaires ou le travail du bois continuent de subir les effets négatifs du malus, avec des taux de séparation qui restent élevés malgré les efforts d’adaptation. Ces secteurs doivent souvent faire face à des augmentations significatives de leurs cotisations patronales, ce qui peut peser lourdement sur leur compétitivité.
- Adaptation des stratégies d’emploi : Globalement, le dispositif a poussé de nombreuses entreprises à repenser leur stratégie d’emploi. Le recours aux CDD et à l’intérim a été limité dans plusieurs secteurs, tandis que l’embauche en CDI a été encouragée.
- Effets sur le marché du travail : Si le bonus-malus a effectivement permis de stabiliser l’emploi dans certains secteurs, son impact global sur le marché du travail reste à évaluer. Certains experts estiment que le dispositif pourrait avoir des effets pervers, en dissuadant certaines entreprises d’embaucher par crainte de devoir payer des cotisations plus élevées.
Perspectives pour l’avenir
La prolongation du dispositif jusqu’au 31 octobre 2024 pose la question de son avenir à plus long terme. Le gouvernement actuel n’a pas encore pris de décision sur une éventuelle prolongation au-delà de cette date, mais le débat reste ouvert. Les entreprises, quant à elles, doivent rester vigilantes et suivre de près les évolutions réglementaires.
La prochaine période de modulation, si elle est prolongée, pourrait s’étendre jusqu’en août 2025, mais cela dépendra des décisions politiques à venir. D’ici là, les entreprises devront s’assurer qu’elles respectent les exigences du dispositif pour éviter de se retrouver en situation de malus.
Synthèse
Le bonus-malus sur les cotisations chômage demeure un levier essentiel pour encourager l’emploi durable en France. Avec la récente publication des taux de séparation médians pour la modulation de septembre/octobre 2024, les entreprises doivent ajuster leurs stratégies d’emploi. Depuis son lancement en 2022, les résultats sont partagés, mais l’objectif de promouvoir des embauches plus stables reste d’actualité.
Pour les entreprises, l’anticipation et la gestion proactive des ressources humaines sont cruciales afin d’optimiser les bénéfices de ce dispositif ou d’en réduire les impacts financiers. Un dossier à suivre attentivement dans les mois à venir.
Arrêté du 22 août 2024, JO du 24, texte 18 ; https://www.legifrance.gouv.
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