Un décret publié au Journal officiel le 5 juin 2025 précise comment sera mis en place le futur registre numérique des saisies sur les salaires, dans le cadre d’une réforme prévue pour le 1ᵉʳ juillet 2025.
Ce texte réglementaire détaille les conditions de traitement, de conservation et d’accès aux informations enregistrées dans ce registre, en particulier celles liées à l’employeur et au salarié débiteur. Cependant, il est important de noter que les employeurs n’auront pas la possibilité de consulter ce registre.

Table des matières
Procédure de saisie des rémunérations : rappels contextuels
Procédure actuelle
La procédure de saisie des rémunérations permet à un créancier privé, comme une banque dans le cadre d’un prêt, de récupérer les sommes dues en saisissant directement le salaire d’un salarié débiteur. Pour cela, le créancier doit posséder un document officiel, appelé titre exécutoire, qui prouve que la dette est claire et exigible. L’intervention d’un juge est obligatoire : après avoir tenté sans succès une conciliation, le juge peut autoriser la saisie. C’est ce qu’imposent actuellement les articles R. 3252-1 et R. 3252-12 à R. 3252-19 du Code du travail.
Réforme à compter du 1ᵉʳ juillet 2025
À partir du 1ᵉʳ juillet 2025, une réforme modifie en profondeur cette procédure. Elle découle de la loi d’orientation et de programmation du ministère de la Justice du 20 novembre 2023. Désormais, l’employeur ne traitera plus directement avec le juge. Un commissaire de justice prendra le relais pour enclencher la saisie, sans décision préalable du juge. Clés saisies par l’employeur seront versées à ce commissaire, qui se chargera ensuite de les redistribuer au(x) créancier(s). En cas de saisies multiples, il les répartira équitablement entre tous.
Élément | Avant réforme / Après réforme |
Autorisation judiciaire | Obligatoire / Supprimée |
Interlocuteur de l’employeur | Le juge / Le commissaire de justice |
Versement des sommes | Directement au créancier / Au commissaire répartiteur |
Répartition entre créanciers | Non prévue / Gérée par le commissaire de justice |

Création d’un registre numérique des saisies des rémunérations
Dans le cadre de la réforme qui entre en vigueur le 1ᵉʳ juillet 2025, un registre numérique sera instauré sous la supervision de la Chambre nationale des commissaires de justice. Ce registre servira à centraliser toutes les données concernant les procédures de saisie des rémunérations en cours.
Objectifs et contenu du registre
Ce dispositif vise à organiser et à faciliter le suivi des saisies en permettant l’accès aux informations nécessaires à l’identification de chaque acteur concerné : commissaires de justice en charge de la répartition, débiteurs concernés, créanciers, ainsi que les employeurs tenus de procéder à la saisie. Les bases légales de cette création sont fixées par l’article 47, I, 2°, b de la loi n° 2023-1059 du 20 novembre 2023 et par l’article 16, 12° bis de l’ordonnance n° 2016‑728 du 2 juin 2016.
Fonctionnement du dispositif
Tout au long de la procédure de saisie, chaque étape — de l’initiation de la mesure jusqu’aux paiements — devra être consignée dans ce registre. Il constituera donc un outil de suivi complet et actualisé.
Mise en œuvre réglementaire
Pour permettre l’application effective de ce registre, un décret d’application était encore attendu. Celui-ci a été publié au Journal officiel du 5 juin 2025, après consultation de la CNIL (délibération n° 2025-015 du 6 mars 2025). Ce texte encadre les modalités concrètes de fonctionnement et de gestion du registre.
Champ d’application
Le décret s’appliquera à toutes les procédures de saisie transférées aux commissaires de justice à compter du 1ᵉʳ juillet 2025 ainsi qu’à celles nouvellement engagées après cette date, selon la nouvelle procédure.
Aspect | Détails |
Autorité en charge | Procédures transférées ou engagées dès le 1ᵉʳ juillet 2025 |
Date de mise en œuvre | 1ᵉʳ juillet 2025 |
Source légale | Loi 2023-1059, ordonnance 2016‑728 |
Contrôle de conformité | Avis CNIL du 6 mars 2025 |
Application | Procédures transférées ou engagées dès le 1er juillet 2025 |
Contenu du registre et conservation des données inscrites
Le décret du 5 juin 2025 encadre de manière détaillée les éléments devant figurer dans le registre numérique des saisies des rémunérations ainsi que les conditions de traitement et de conservation des données collectées.
Données inscrites au registre
Les informations contenues dans le registre concerneront différents acteurs et éléments de la procédure. Elles incluront l’identité du salarié débiteur, celle de l’employeur, du créancier, du commissaire de justice chargé de répartir les sommes ou d’exécuter la saisie. Le registre comprendra aussi les données utiles à l’identification des créances, des titres, des décisions de justice, des actes de procédure, des cessions et des éventuels incidents liés à la saisie. Un arrêté à venir devra préciser la liste exacte des données à enregistrer (article 2 du décret).
Exercice des droits des personnes concernées
Les personnes dont les données sont enregistrées dans le registre — notamment les employeurs et salariés débiteurs — pourront s’adresser à la Chambre nationale des commissaires de justice pour demander l’accès, la rectification ou la limitation du traitement de leurs données. En revanche, elles ne pourront pas s’opposer à leur utilisation, comme précisé dans l’article 7 du décret.
Durée de conservation des données
Les données resteront dans la base active tant que la procédure n’est pas radiée, dans la limite de dix ans. Ce délai pourra être prolongé si la radiation n’a pas encore eu lieu. Cependant, les données ne pourront en aucun cas être conservées plus de soixante ans à compter du premier acte inscrit dans le registre (article 5 du décret).
Consultation et mise à jour du registre numérique
Consultation du registre
Seuls les commissaires de justice responsables de l’exécution des décisions de justice et des titres exécutoires, ainsi que la Chambre nationale des commissaires de justice, auront le droit de consulter le registre. Cet accès se fera uniquement dans la limite de ce qui est nécessaire à leur mission (article 4 du décret). Les employeurs, quant à eux, ne sont pas autorisés à accéder aux données contenues dans le registre.
Mise à jour du registre
Les informations liées aux procédures de saisie des rémunérations et aux paiements directs de pensions alimentaires seront ajoutés, modifiées ou supprimées dans le registre par les commissaires de justice compétents pour chaque tâche : celui qui saisit, celui qui répartit, et la Chambre nationale des commissaires de justice. C’est ce que stipule l’article 3 du décret du 3 juin 2025.
Le décret précise également que certains événements particuliers, comme un licenciement du salarié, devront être immédiatement inscrits dans le registre dès qu’ils surviennent. Cette mesure vise à maintenir l’exactitude et l’actualité des données enregistrées (article 9 du décret ; nouvel article R. 212-1-31-1 du Code des procédures civiles d’exécution).
Élément | Détail |
Qui peut consulter ? | Commissaires de justice et Chambre nationale des commissaires de justice uniquement |
Employeurs ? | Non autorisés à consulter |
Qui met à jour ? | Commissaires de justice (saisissant et répartiteur) et Chambre nationale |
Mise à jour obligatoire | Les événements tels que le licenciement doivent être enregistrés sans délai. |
La réforme du registre numérique des saisies des rémunérations impose un encadrement rigoureux de la consultation et de la mise à jour des données. Seules les autorités désignées sont habilitées à consulter ou modifier ces informations.
Le décret du 3 juin 2025, publié au Journal officiel le 5 juin, formalise ces nouvelles règles et insiste sur l’importance de la réactivité dans la gestion des événements liés aux procédures. Ces mesures assurent une meilleure transparence, une coordination accrue entre les acteurs et une protection renforcée des données personnelles.